Voici en substance ce que Charles de ROHAN-SOUBISE (1715-1787), maréchal, prince de Soubise, écrivait - mais en termes plus raffinés, correspondant mieux à son niveau d'éducation - en réponse à l'un des anciens capitaines de son régiment qui, en 1781, l'avait sollicité pour être le parrain de son enfant à naître.
    Le demandeur était Antoine de PAUL de SAUSSES, né le 16 décembre 1730 à Castellane (Provence) d'Antoine PAUL de SAUSSES (1666-1733), lieutenant-colonel d'infanterie, premier consul de Castellane en 1729, et d'Anne CASTEL (ca.1730-1772).
En 1781, à l'époque de sa demande, son épouse, Marie Marguerite BAUDRIER de CHATEAUDOUBLE (avec laquelle il s'était marié le 26 février 1772 à Châteaudouble -Var -), attendait son quatrième enfant. Elle en aura encore neuf. Les époux habitaient alors à Castellane.
Antoine de PAUL de SAUSSES était un ancien officier qui avait terminé sa carrière avec le grade de lieutenant-colonel d'infanterie. Il l'avait débutée en juin 1752 dans la Compagnie des Cadets des Colonies établie au port de Rochefort et composée de gentilhommes. Un an plus tard, en 1753, il était nommé garçon-major des troupes des colonies. En 1754, il était promu officier dans la compagnie des cadets ; il en deviendra sergent. En juillet 1759, le roi lui confiait le commandement de cette compagnie, ce qui lui donnait, semble t'il, le rang de lieutenant des vaisseaux du roi.
La compagnie des cadets ayant été supprimée, il était incorporé comme capitaine d'infanterie dans les troupes entretenues à Saint-Domingue (Isles sous le Vent) et plus spécialement au régiment d'infanterie de Quercy le 1er novembre 1761, avec effet au 1er janvier 1760. Sa compagnie qu'il avait la charge d'entretenir, était composée de 50 hommes, officiers compris. Elle quitta Rochefort fin novembre 1761.
   " A la fin de la dernière guerre contre l'Angleterre ", il passera alors cinq années à Saint-Domingue où il vit périr 83 officiers et 2.000 soldats de son régiment.
    En 1767, il était toujours à Saint-Domingue mais en 1768, son régiment est caserné à Alais (Gard).
Puis il faisait les campagnes de guerre en Corse de 1768 et 1769.
    En 1770, son régiment était à Marseille, et en 1773, à nouveau en Corse.
Le 1er juillet 1774, en remplacement du capitaine de VINCENT, il était nommé capitaine de la compagnie de grenadiers du même régiment de Quercy qui, en 1775, était caserné à Huningue.
Le 7 mai 1776, Louis XVI prenait une ordonnance pour mettre le régiment d'infanterie de Quercy, sous le nom de Rohan-Soubise .
Le 23 mai 1777, il était admis à la dignité de chevalier de l'Ordre militaire de Saint-Louis et il reçut la croix des mains du comte Jacques de CARLES (1724-1803), le dernier colonel commandant du régiment d'infanterie de Quercy et le premier de celui de Rohan-Soubise.
Puis, le 28 août 1777, il était promu capitaine commandant de la compagnie des grenadiers dans le régiment de Rohan-Soubise en remplacement du capitaine de BOUCHEROLLES.
Ensuite on trouve le régiment cantonné à Bergues (1778).
En 1778, à la demande de Louis XVI, le duc de BROGLIE (Victor-François de Broglie,1718-1804), Maréchal de France, avait réuni plus de 30 000 hommes à l'est de Bayeux afin d'exercer les troupes à différentes tactiques militaires. Celui-ci installait alors son quartier général au château de Vaussieux (à Vaux-sur-Seulles dans le Calvados), sur les terres de son ami le marquis de HÉRICY. Les manœuvres qui furent opérées au "camp de Vaussieux" contribuèrent grandement contribué à améliorer l'efficacité des armées françaises ainsi qu'à la victoire de Yorktown en 1781 contre les Anglais.
Pour Antoine PAUL de SAUSSES, ces manœuvres marquèrent la fin de sa carrière militaire car, dans des circonstances que nous ne connaissons pas, il y " reçut une blessure à la tête qui le laissa dix jours sans connaissance. Il fut trépané, presque sans espoir, longtemps sans raison et perdit tout à fait la mémoire. Cet accident le mit hors d'état de continuer le service. "
Le 22 septembre 1778, le comte de CARLES, brigadier des armées du roi, colonel commandant du régiment d'infanterie de Rohan Soubise, le comte de RUPPIERRE (1741-1785), colonel en second, M. SALSE (Louis Marie SALSE d'ERNECOURT, 1761- ?), lieutenant colonel, et M. de FROMENT (Jacques Marie de FROMENT, 1740-1817), major du régiment, lui délivraient un certificat à son départ du régiment, s'étant trouvé " par différentes infirmités, hors d'état de continuer le service ".
Début décembre 1778, Antoine de PAUL de SAUSSES, " plus content de sa santé et espérant un prochain rétablissement ", sollicitait du duc de BROGLIE, son intervention afin d'obtenir une retraite. Le 13 décembre 1778, le duc de BROGLIE, répondait à " M. de PAUL, compagnie de grenadiers du régiment de Rohan-Soubise à Caen ", qu'il l'assurait de son soutien pour lui " faire obtenir une retraite avantageuse ".
Le 22 janvier 1779, le marquis de MONTBAREY lui écrivait également qu'en raison de l'impossibilité où sa situation le mettait de continuer son service, le roi lui avait accordé (2 janvier 1779), des appointements de retraite de 1.200 livres par an, payables dans la place militaire d'Entrevaux.
Alexandre Marie Eléonor de Saint-Mauris-Montbarrey, comte de Montbarrey puis prince de Montbarrey et du Saint-Empire (1776), grand d'Espagne de première classe (1780), chevalier du Saint-Esprit, né le 20 avril 1732 à Besançon et mort le 5 mai 1796 à Constance, fut lieutenant-général des armées et Secrétaire d'État à la Guerre de 1777 à 1780 sous Louis XVI.
Le 3 juin 1779, la même personne lui faisait savoir que "compte tenu de ses services et du malheur qui lui était arrivé au camp de Vaussieux ", le roi avait ajouté (3 janvier 1779) à sa retraite la commission de lieutenant-colonel d'infanterie.
Il est décédé à Castellane, à 63 ans, le 3 juillet 1793, laissant notamment, parmi ses enfants, Jean Antoine Emmanuel de PAUL (1774-1846), plus connu sous le patronyme de PAUL de CHATEAUDOUBLE, et dont nous avons détaillé la vie sur ce blog, le 11 novembre 2010, dans l'article " Famille de PAUL de SAUSSES, de PAUL de CHATEAUDOUBLE (Var) ".
Pour revenir à l'objet de cet article, ce n'est pas PAUL de CHATEAUDOUBLE qui fut l'objet de la demande de parrainage par son père auprès du Maréchal Prince de ROHAN-SOUBISE, mais l'enfant qui allait naître le 3 septembre 1781 à Castellane : Marie Elisabeth Emilie de PAUL des SAUSSES (future épouse de Léger TAXIL). Compte tenu de son sexe, elle ne put avoir comme parrain ce membre de la haute noblesse lors de son baptême, le 4 septembre, car celui-ci avait précisé dans sa lettre du 25 février 1781, " J'y mets la condition que ce sera un garçon. C'est un usage que je me suis fait depuis longtemps ".
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